Le secrétaire d’État américain Anthony Blinken était à Montréal le 28 octobre pour encourager le Canada à diriger une force d’intervention internationale en Haïti. Tous les pays déplorent la situation épouvantable en Haïti, mais personne ne veut mettre sa main dans ce panier de crabes.
Il est clair que, quoi qu’ils fassent ou ne fassent pas, les acteurs étrangers qui interviennent seront jugés sévèrement par le peuple haïtien. Pourquoi gaspiller de l’argent, des ressources et du prestige alors que la situation sera aux mieux désastreux lorsque les forces d’intervention partiront ?
Dans une interview avec le journaliste Benoit Dutrizac, l’expert politique français Loïc Tassé a discuté de la situation actuelle en Haïti, demandant : « Pourquoi personne ne veut aller en Haïti ?
“Avec un revenu annuel par habitant de 2 800 dollars, Haïti est l’un des pays les plus pauvres du monde, Malgré cela, près de 40 % de la richesse du pays provient des transferts de fonds envoyés chaque année par ses expatriés. Plus de 60% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, tandis que l’inflation atteint 25% par an et le chômage 40% », a déclaré Loïc Tassé. L’extorsion par des groupes armés a paralysé une grande partie du commerce de l’énergie. Ces groupes armés ont créé un climat de violence dans tout le pays. Selon Benoît, certains membres de l’élite haïtienne ont des liens étroits avec divers groupes armés.
Benoit Dutrizac a demandé à son invité : « Qui est responsable de cette situation catastrophique ? » . « L’élite haïtienne aime trouver des excuses et blâmer les étrangers pour la situation désastreuse du pays. En réalité, ces élites sont largement responsables des problèmes du pays. Par exemple, depuis l’assassinat du président du pays il y a 16 mois, le premier ministre gouverne de manière anticonstitutionnelle, aucune élection n’a été organisée et personne en Haïti n’a pu le forcer à introduire plus de démocratie », a-t-il déclaré. » En ajoutant que les élites étaient en concurrence les unes avec les autres. En particulier, les hommes d’affaires syro-libanais sont en désaccord avec l’élite économique haïtienne traditionnelle. Et l’élite politique, qui a commencé avec le régime de Duvalier, a été divisée en factions de l’ancien régime.
La question du rôle de l’Eglise en Haïti était également importante pour Benoit Dutrizac autour de cette crise, et Loïc tenait l’Eglise pour responsable d’une partie de la pauvreté. La pression des curés pour encourager la procréation fait qu’il est difficile pour les familles ayant trop d’enfants de se constituer des excédents ou de s’engager dans un travail. “Haïti est deux fois plus densément peuplé que la Dominique, qui occupe l’autre moitié de l’île et possède six fois plus de richesses qu’Haïti. Cette forte densité a également créé de graves problèmes environnementaux. « Je suis désolé », a-t-il ajouté.
Selon une enquête du New York Times, à la veille de son assassinat, le président Jovenel Moise a révélé au gouvernement américain une liste de trafiquants notoires issus des sphères politiques, commerciales et judiciaires. Il semble que deux familles en particulier aient une forte influence mafieuse en Haïti, les Martelly et la famille Saint-Rémi. Curieusement, le Conseil de sécurité des Nations unies n’a pas encore voté de sanctions à leur encontre.
« La diaspora haïtienne devrait également participer à la transformation du pays, mais elle est souvent crainte et rejetée par l’élite haïtienne », selon Loïc. « La diaspora est éduquée et largement immunisée contre toutes sortes de pressions de la part des élites qui restent en Haïti. L’élite haïtienne exige que la diaspora transfère des fonds et reste silencieuse. »
Facebook Comments