Assassinat de Jovenel Moïse, 4 mois plus tard les vrais coupables ne sont toujours pas connus 

Revital Lynch
ParRevital Lynch

7 juillet 2021, tôt dans la matinée, Haïti s’est réveillé sans son président. La nuit du 6 au 7 juillet a été témoin de l’assassinat du Président Jovenel Moïse. Et 162 ans plus tard, la République connait un nouveau drame, un autre assassinat en juillet comme pour le cas de Vilbrun Guillaume Sam. 

Dans un bref délai, contrairement aux prévisions de certains membres de l’opposition, la crise a commencé à sortir ses griffes, un duel de notoriété pour la place au siège de la primature, mettant à couteaux tirés le ministre en place et un autre nommé par l’ex-président. Claude Joseph et Ariel Henry, les deux présumés ministres n’arrivaient pas à s’entendre pour le poste. 

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A peu près huit jour depuis l’assassinat de Jovenel Moïse, les photos du cadavre du président sont devenues virales, même certaines images de la radiographie ont été leakés. Le gouvernement n’a pris aucune résolution pour ouvrir une enquête sur cet acte de dénigrement et de vandalisme. 

Suite à quelques compromis, Ariel Henry est devenu Premier ministre le 20 juillet 2021. Dans son discours, le docteur, héritant d’un pays qui est presqu’au stade finale de sa maladie, fait à la République, la plus complexe des promesses : « la poursuite de l’enquête sur l’assassinat du président Jovenel Moïse, la lutte contre l’insécurité, l’organisation des élections, la relance de l’économie, la lutte contre le Covid-19, entre autres ». 

Le 23 juillet, Haïti a fait son dernier adieu à son Président en rabaissant au plus bas niveau l’image présidentielle aux yeux du monde entier. Une honte pour la première République noire. Pas de corbillard présidentiel, les restes de Jovenel Moïse sont parties dans un mini bus. 

À mon avis, c’est une leçon pour les politiciens qui oublient souvent la valeur des postes qu’ils occupent. Si les présidents en vie prenaient le soin d’honorer convenablement ceux qui sont morts durant leur mandat, ne serait-ce que pour le fait qu’ils avaient occupé cette fonction de si haut rang, il y aurait une structure en place pour ces genres de cérémonies. Même si Haïti n’avait pas connu ce genre de drame depuis plus d’un siècle et demi, on aurait pu sauver la honte. 

Haïti inhume son président et la tension a recommencé à monter et le cout de la vie aussi. Port-au-Prince connait un dernier élan dans les actes de kidnapping. Les gangs ont pris note de leur niveau d’autorité, ils continuent de faire la loi, leur loi. 

Le 23 juillet 2021, la police haïtienne a arrêté une vingtaine de mercenaires colombiens. Et les investigations se sont orientées sur la garde rapprochée du président. Le 27 juillet, le commissaire divisionnaire Jean Laguel Civil est placé en garde à vue. Il était l’un des 4 hauts gradés de la police nationale chargés de la sécurité de Jovenel Moïse, ,un avis de recherche a été émis visant Wendelle Coq Thélot, une juge à la Cour de cassation, la plus haute instance judiciaire du pays. Elle avait été mise à la retraite par le président Moïse. 

Des documents présentés comme internes au ministère de la Justice, qui font état de nombreuses menaces de mort et autres, sur les enquêteurs. 

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Le 7 aout marque un mois depuis l’assassinat du Président Jovenel Moïse, Haïti attend toujours que l’internationale lui vienne en aide dans l’affaire. Nombreuses sont les hautes personnalités, politiques pour la plupart, qui requièrent l’aide internationale pour mener l’enquête et faire lumière autour de l’affaire de l’assassinat de Jovenel Moïse. 

Le 14 aout, au lieu de célébrer l’anniversaire de la cérémonie du Bois Caïman, Haïti se lève à nouveau dans le chaos. En pleine crise de COVID-19, à 8:30 du matin, un tremblement de terre dévastateur a secoué la péninsule sud d’Haïti, à seulement 12 km au nord-est de Saint-Louis du Sud et à environ 125 kilomètres à l’Ouest de la capitale, Port-au-Prince. Ce séisme a affecté considérablement les bâtiments et maisons de la du grand sud et à cause de sévère dommages aux infrastructures de bases et sur routes, coupant l’accès à certaines zones du sud-ouest, notamment la route nationale numéro 7, reliant le Cap à Jérémie. 

Le 25 août, les chiffres officiels de la Direction Générale de la Protection Civile (DGPC) font état de 52,953 maisons détruites et 77,006 maisons ont été endommagées, y compris 25 centres de santé, 127 écoles et 60 bâtiments religieux. 

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Toujours selon le DGPC, le séisme a causé au moins 2,207 morts, 12,268 personnes blessées, et 320 personnes portées disparues. De plus, au moins 650,000 personnes ont besoin d’une aide humanitaire, tous à la merci du gang du Village de Dieu dirigé par Manno et Izo. 

Le moment d’une trêve, les gangs ont tout de suite repris le contrôle des trafics à l’entrée sud de la capitale et l’accès à l’aide des sinistrés est coupé. Aujourd’hui, ils en paient encore les conséquences. Haïti a vécu la seconde version du scenario assistance mortelle de Raoul Peck. L’aide international n’a pas parcouru le bon chemin. 

Le gouvernement n’a pas été efficace et les sinistrés se retrouvent par milliers sans abri alors que la saison cyclonique constituait un second problème de la catégorie urgence. 

Entre-temps les crises se multiplient, la situation s’aggrave et un autre mois s’écoule l’affaire de l’assassinat de Jovenel Moïse est toujours dans l’impasse. Les dénommés jovenelistes ont tenté de montrer les crocs, des petits groupes manifestent pour réclamer justice. D’autres sur les réseaux publient autour de l’hashtag #jistispoujovenel. 

Le secteur privé et Ariel Henry ont eu une réunion au cours de laquelle ils ont communiqué quelques propositions face à la crise dite multiforme : 

  • Résoudre le problème de l’insécurité demeure une des priorités,
  • Libèrerles grands axes routiers occupés par des gangs armés,
  • Trouver un accord politique avec tous les acteurs concernés,
  • Promouvoir un dialogue constructif,
  • Organiser des élections dans un environnement propice,
  • Remanier le CEP selon un processus inclusif et un audit de la carteDermalog,
  • Recommencer à faire fonctionner l’État et s’assurer d’une bonne gouvernance,
  • Revisiter la Constitution,
  • Bâtir un consensus pour déterminer les prochaines étapes.

Si le problème de l’insécurité et l’occupation des grands axes routiers par des bandits persistent, le Premier ministre a réussi à satisfaire nombre des prescriptions du secteur privé. Presqu’aussi copieusement qu’un élève soucieux de ses devoirs. 

Il a signé l’accord le 11 septembre 2021, du coup dans l’objectif de promotion de dialogue constructif, il a pu mettre à ses côtés le secteur démocratique et populaire, particulièrement le militant politique André Michel, autoproclamé ‘avoka pèp la’. 

Quant à l’organisation des élections, Ariel Henry ne veut pas manquer cet exercice de ses devoirs, malheureusement l’environnement refuse d’être propice. Mais l’exercice de remaniement du CEP, il l’a réussi, les dates sont repoussées, vire le conseil électoral formé par Jovenel Moïse. Et d’importantes révélations font croire que chacun des membres du CEP coutait à la République plus d’un million de gourdes par mois. 

Au beau milieu de la crise multiforme, Ariel Henry prépare des élections, son CEP est bourdé par plusieurs organisations locales. 

Des révocations se sont multipliées au sein du gouvernement, mais l’état haïtien, le moteur central, ne peut toujours pas recommencer à fonctionner comme il faut, la bonne gouvernance essuie des échecs au quotidien. 

Haïti devient de plus en plus agressif même pour les plus privilégiés. La vie se complique pour la quasi-totalité de la population. Si le kidnapping et le pétrole étaient des personnes, l’une aurait été élue personnalité du mois de septembre et l’autre du mois d’octobre. Car le kidnapping a atteint un pic de 300 % au mois de septembre et le pétrole est vendu 8 fois la valeur en octobre. 

Des milliers d’haïtiens quittent le pays pour se réfugier en république voisine, d’autres en Amérique du Sud, même les milliers de déportations des migrants haïtiens par les autorités américaines, dominicaines et autres, ne peut dissuader les haïtiens de fuir la terre natale. Les migrants haïtiens sont traités comme des moins que rien par contre, le gouvernement ne se soucie guère du sort de ces migrants. 

La crise du pétrole a causé des journées de grève, le gouvernement reste dans son mutisme et ses dernières réactions demeurent des échecs. Un peu plus tard les gangs se sont intégrés dans l’affaire de l’essence. L’état doit payer pour que les gangs autorisent le trafic pour la distribution du pétrole. 

Le kidnapping parallèlement prend un tel niveau d’expansion que les gangs de 400 Mawozo ont fini par enlever 17 missionnaires étrangers, 16 américains et un canadien. Le groupe est aussi constitué de cinq enfants, âgés de huit mois à 15 ans. 

Les américains entre les mains de Lanmò San Jou, mais l’histoire prend la forme d’un film hollywoodien, le FBI vient à Haïti pour enquêter sur l’affaire, des spéculations et rien de plus. À quoi jouent les États-Unis ? Lanmò San Jou serait-il un dur à cuire qui dépasserait Ben Laden ? Nul ne sait à quoi rime cette enquête. Par contre, le caïd des 400 Mawozo exige 17 millions de dollars de rançon à raison d’un million par tête. 

Toutes ces agitations, ne surviennent que quelques jours après que Kenneth Merten, fantôme de la diplomatie ait refait surface. Il est nommé charger d’affaires des États-Unis à Haïti, il a été ambassadeur à Port-au-Prince de 2009 à 2012. 

Les chocs du mois d’octobre pourraient laisser d’importantes séquelles à l’économie nationale. Déjà les prix des produits sont revus à la hausse. Des entreprises mettent les verrous sous clefs, certaines ont dû ralentir sur leurs activités à cause des difficultés que rencontre le pays pour s’approvisionner en pétrole. 

D’un autre côté, Luis Abinader se comporte en président de l’Île, pour cacher ses péchés révélés par l’affaire Pandora Papers, l’homme qui prétend combattre la corruption est mis à nu et il saisit l’opportunité de la situation en Haïti pour s’éclipser face à l’opposition. Du coup, le président dominicain mène un politique de bras de fer contre les haïtiens. 

L’affaire se complique de plus en plus, certains des présumés criminels ont même eu le temps de se rendre en terre étrangère tel est le cas de Mario Antonio Palacios arrêté en Jamaïque, au cours du mois d’octobre. Des dossiers disparaissent, des actes de braquages sont reportés et le juge chargé d’instruire l’affaire subit des attaques. 

Ce 7 novembre, Haïti se réveille encore avec la même question : Quand est-ce la justice tranchera sur l’affaire de l’assassinat du président Jovenel Moise ? Une question qui est souvent posée durant ces quatre derniers mois, mais la réponse tarde encore à venir. 

Rendre justice à Jovenel Moïse est un défi de la République d’Haïti qui doit au préalable se rendre justice, qui doit aussi rendre justice à Jean Jacques Dessalines assassiné depuis plus de deux siècles. Compte tenu de l’actuelle situation, le procès de l’assassinat de Jovenel Moïse pourrait s’aligner sur le banc d’attente comme beaucoup d’autres. 

 

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Ray est un jeune web entrepreneur et journaliste évoluant dans le monde du multimédia. Il est un passionné de la technologie et de ses sciences connexes.