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L’économiste Frédéric Gérald Chéry critique la gestion des prix par l’État et suggère une restructuration de l’économie haïtienne

Les derniers chiffres publiés par l’IHSI sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation (IPC) pour septembre 2022 montrent une augmentation de l’inflation annuelle de 38,7%, après avoir atteint 32% en août de cette année. Cette augmentation incessante du coût de la vie devient une épidémie très inquiétante qui touche tous les secteurs de la société dans tout le pays. 

Tout le monde en parle et le professeur Frédéric Gérald Chéry a été invité à donner son avis sur ce phénomène. Il affirme que l’économie haïtienne doit être repensée, compte tenu de la gestion désastreuse des prix du marché par les autorités haïtiennes. 

« Le gouvernement haïtien n’a pas réussi à relever un certain nombre de défis, notamment des taux d’inflation record depuis le début de l’année, au grand dam des consommateurs. La question est si préoccupante qu’elle alimente tous les discours. » Intervenant sur Magik9 le 30 novembre, le professeur Frédéric Gérald Chéry a d’abord tenté de retracer les temps forts de l’inflation dans le temps. 

Les cinquante dernières années ont particulièrement retenu son attention car elles ont constitué un moment clé dans la montée de l’inflation. À cet égard, M. Chéry a évoqué la pénurie alimentaire du milieu des années 1970 et l’augmentation du coût de la vie due à l’embargo des Nations unies sur Haïti au début des années 1990. 

Toutefois, l’économiste admet que dans les deux cas précédents, l’inflation n’a pas atteint les niveaux que nous connaissons aujourd’hui, avec des taux de 32% et 38,7% en août et septembre 2022 respectivement, selon les dernières données publiées par l’IHSI. De manière générale, selon l’auteur du livre « La reconstruction de la Gourde », l’économie haïtienne a été caractérisée par une inflation galopante, les prix ayant tendance à augmenter progressivement, réduisant ainsi peu à peu la valeur de la monnaie locale. 

Toutefois, en ce qui concerne la situation actuelle, le professeur Chéry apporte une nuance. Pour lui, aujourd’hui, en plus de l’inflation galopante qui caractérise habituellement le marché de la consommation haïtien, le pays fait face à de nouvelles hausses de prix liées à un nouvel ensemble de contraintes qui pèsent sur l’économie haïtienne, notamment l’insécurité, entre autres. Malheureusement, les mesures palliatives proposées par les dirigeants pour tenter de stabiliser les prix n’ont jamais été efficaces. Les rares périodes de baisse du coût de la vie en Haïti ont été en 2008, suite aux  » émeutes de la faim  » menées par le président Préval, et après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, aidé par l’aide extérieure et la baisse des prix sur le marché mondial. 

Les régions les plus touchées 

Si la flambée de l’inflation a touché le pays dans son ensemble, certaines régions ont été plus affectées que d’autres, selon les données de l’IHSI, qui cite la zone métropolitaine et le sud comme les régions les plus touchées en septembre dernier, avec des taux de 39,5 % et 41,1 % respectivement. L’économiste Gérald Chéry soutient les chiffres de l’IHSI, qui sont en phase avec l’instabilité et l’insécurité que connaît le pays depuis plus d’un an. 

Il affirme que l’insécurité a en fait contribué à la circulation normale des produits et des marchandises, et qu’il est presque impossible de se déplacer d’un point à l’autre du pays. Selon Gérald Chéry, les pics observés dans ces deux régions sont principalement attribuables aux manifestations populaires assez violentes qui ont secoué la zone métropolitaine de Port-au-Prince en septembre et octobre 2022, ainsi qu’au blocage systématique de la sortie sud de la capitale haïtienne par des groupes armés. 

Le professeur poursuit en disant que le blocage de la sortie sud de la capitale a réduit la circulation des marchandises vers les départements du grand Sud, et vice versa. À Port-au-Prince, il a été difficile, voire impossible, de faire passer des marchandises par la douane pendant toute la durée des manifestations. Même à l’intérieur de la zone métropolitaine, la circulation des marchandises était impossible », explique M. Chéry, « en d’autres termes, le prix des marchandises a augmenté davantage dans le sud et dans la zone métropolitaine, car ces deux régions ont été plus touchées que toute autre en termes d’approvisionnement du pays. 

 

Witson Beaujour, journaliste-rédacteur, chanteur, musicien et mécanicien industriel. Passionné de reportages, de documentaires et de lecture.

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