Chaque fin d’année, la majorité des tribunaux de première instance de la République ont l’habitude d’organiser des audiences correctionnelles et criminelles, dans l’objectif de libérer des détenus reprochés pour des faits moins aggravants et de désengorger les centres carcéraux, en d’autres termes on peut parler de grâce. Mais ces genres de prérogative ont été toujours octroyées suite à des procédures judiciaires spéciales, tels le recours en habeas corpus, la détention préventive prolongée et d’autres.
La détention préventive prolongée est le fait qu’une personne incarcérée en attente de son jugement ou à l’attente de la fin de l’instruction de sa cause reste et demeure en détention préventive au-delà du délai légal. Cette instruction doit se faire dans un délai de deux mois d’après l’article 7 de la loi du 29 juillet 1969 sur l’appel pénal. Cependant, l’habeas corpus est un principe de comparution sur un délai de 48 heures et est la règle de droit qui garantit à une personne arrêtée une présentation rapide devant un juge afin qu’il statue sur la validité de son arrestation.
Depuis plusieurs décennies la détention préventive prolongée a été constater en Haïti et reste et demeure un défi pour le pouvoir judiciaire haïtien. Les droits des détenus se sont piétinés. Selon quelques informations recueillies de leur part, ils ont vécu plusieurs années dans les prisons sans avoir été entendus par un juge, or la Constitution de 1987 amendée dans son article 26 dispose que : « Nul ne peut être maintenu en détention s’il n’a pas comparu dans les 48 heures qui suivent son arrestation par-devant un juge appelé à statuer sur la légalité de l’arrestation “.
Selon un rapport du bureau intégré des Nations-Unies en Haïti (BINUH) publié en date 26 janvier 2021, Haïti fait toujours partie de la liste des 10 pays au monde les plus affectés par la détention préventive prolongée, malgré les efforts réalisés par les autorités compétentes afin de lutter contre la détention préventive prolongée. Dont le taux de détention préventive dans les prisons haïtiennes en pleine 21è siècle s’élève à 80% de la population carcérale.
Alors même qu’elles jouissent de la présomption d’innocence, les personnes en détention préventive et donc en attente d’une audition judiciaire, sont souvent incarcérées plus d’une dizaine d’années. Privées d’assistance légale et sans avoir eu la possibilité de comparaître devant les institutions judiciaires.
Dans le souci pour atteindre cette fois-ci des résultats significatifs, le BINUH appelle tous les acteurs de la chaîne pénale, en concertation avec le MJSP et le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, à se mobiliser et à travailler ensemble, dans le respect de leurs mandats et attributions respectifs, afin de réduire drastiquement la détention préventive prolongée dans les prisons haïtiennes. Le BINUH et le système des Nations Unies, en collaboration avec les partenaires techniques et financiers d’Haïti, continueront à appuyer les efforts entrepris pour combattre ce fléau qui remet en cause les droits des individus et menace les fondements de l’État de droit dans le pays.
D’un autre côté, lorsqu’un détenu ayant subi la détention préventive prolongée est enfin jugé, la Loi du 4 décembre 1893 relative à l’imputation de la durée de la prison préventive sur la durée des peines correctionnelles ou criminelles plus connue sous le nom de Loi Lespinasse, intervient en sa faveur, plus précisément dans son article 1er qui nous a fait savoir que : ” Passé le délai de deux mois, la détention préventive sera imputée sur la durée de toute peine temporaire, correctionnelle ou criminelle, elle ne comptera que pour moitié en ce qui touche la peine des travaux forcés à temps.” De plus, le temps que le détenu avait passé en attendant sa condamnation au-delà des deux mois de l’instruction seront déduits du temps qu’il aura à passer en prison si toutefois il est condamné.
De ce fait, les fonctionnaires de l’institution policières qui sont l’auxiliaire de la justice, devraient prendre des mesures décisives afin de restaurer le respect au sursis de détention préventive prolongée de 48 heures prescrit par la loi mère de la République, à savoir la constitution dans le but pour diminuer le nombre de personnes incarcérées dans les différentes prisons dans ce pays.